Identité et appartenance au groupe

11 mars 2022
Hpi

Le groupe c'est moi ?

Par cette question peut être un peu provocante j’aimerai essayer de creuser l’idée de l’identité au regard de l’appartenance à un groupe. Et, plus spécifiquement, de la personne détectée HPI.

On pourrait je pense l’élargir aux personnes qui se « pensent » HPI sans avoir passé un test.

Sans rentrer dans le débat du bien fondé du test, de ce qu’il test et ne test pas, c’est une décision qui appartient à chacun.

Décision qui, parfois, est limitée par le coût que cela peut représenter ou tout simplement parce que cela ne fait pas sens pour la personne concernée.

Je sais que pour certains seule une personne qui a « validé » un test peut se targuer d’être HPI. Cela peut s’entendre bien sur. Mais j’ai une approche ouverte et respectueuse des choix de chacun et j’essaie d’inclure cela dans une réflexion plus globale.

Ceci étant il y a lieu de reconnaître qu’il y a peut être une plus grande possibilité d’être soumis à des biais cognitifs comme le fameux effet Barnum lorsque l’on n’a pas été testé. Ou encore les biais de confirmation qui tendent à ne rechercher que les informations qui viennent valider sa propre croyance.

Il est donc important d’avancer prudemment sur ces questions sans vouloir en sortir des généralités.

Il est bon aussi de préciser que tout cela ne représente que quelques questionnements sans valeur scientifique ni prétention aucune. Les vérités toutes faites ce n’est pas ma philosophie ! Je suis plutôt un adepte du « non savoir » qui est une ressource précieuse en coaching ( qui n’est pas, faut il le rappeler, de la psychothérapie, du conseil ou de la formation ).

Simplement donc quelques éléments de réflexions afin d’amener peut être chacun/chacune à s’interroger soi même sur cette idée d’appartenance.

Lorsqu’une personne s’attache donc à cette identification de HPI s’ouvre parfois une nouvelle zone d’incertitude.

Cela touche à son identité et il est fréquent que l’on en vienne à revisiter son passé au regard de ce nouvel éclairage. Parfois pour commencer à comprendre … ou se comprendre différemment.

Car se définir soi même c’est aussi se projeter différemment dans l’avenir.

Et de tout temps une façon simple de clarifier son identité a été de se retrouver dans un groupe. J’entends ici la notion de groupe comme un ensemble de personnes partageant des points de ressemblances.

Plus nous sommes dans l’incertitude de ce que l’on est et plus on a tendance à rechercher des « codes », des « comportements sociaux » qui vont nous renvoyer, en miroir, une grille de lecture rassurante et éclairante.

Si l’on pourrait imaginer qu’il existe alors une sorte de « groupe HPI » ( j’utilise ce terme par préférence personnelle mais c’est tout aussi valable en utilisant un autre mot ) dans lequel on va pouvoir se reconnaître, échanger avec d’autres, construire une vision de soi on pourrait tout aussi bien subdiviser ce groupe assez général en une multitude d’autres correspondant à des sensibilités parfois différentes.

Le plus connu à ce jour est peut être celui de « zèbre ».

Mais on pourrait en trouver pleins sur les réseaux sociaux ou bien encore des associations spécialisées qui peuvent avoir leurs propres visions du haut potentiel.

Dans un sens pourquoi pas. Personnellement je n’y vois pas de problème particulier. Mais je me pose la question de l’identité personnelle. Et je la pose de façon très ouverte et bienveillante.

Si l’idée de se comprendre soi même motive, tout du moins en partie, l’adhésion à un ou plusieurs groupes, est ce que le but est rempli ?

Je n’ai pas de réponse car c’est à chacun de se poser la question et justement de tenter d’y répondre.

Mais ce que je constate parfois c’est que l’adhésion à un groupe, disons de façon plus générale l’adhésion à une sorte de communauté HPI peut avoir tendance à figer son identité.

En bref « Si je suis comme ça c’est parce que je suis HPI » ( et sous entendu la représentation que j’en ai est alimentée par les émanations du ou des groupes auxquels je m’identifie ).

Partant de là comment avancer lorsqu’un problème se pose ?

 

L’individu HPI est bien souvent soumis a plusieurs défis.

Se comprendre et comprendre le monde dans lequel il évolue notamment. Bien entendu ce n’est pas un questionnement qui lui est propre ! Pour autant ces thématiques peuvent avoir une intensité bien particulière lorsque, de par son identification au vaste « mode » du HP, on se sent un peu « différent ».

La question peut être alors différent par rapport à quoi et à qui ? Si l’on considère que nous sommes tous différents ( HPI ou pas ) qu’elle est alors cette différence qui fait … la différence !?

Cette dichotomie entre une personne HPI et les autres, de mon point de vue, n’est pas forcément très aidante.

Il n’y a pas des HPI d’un côté et des individus dans la norme de l’autre. C’est oublié la nature systémique du monde. Tout évolue dans une sorte de mouvement circulaire.

Pour exemple la symbolisation de la dualité est parfois représentée par le Yin et le Yang. Mais si il existe un point noir dans la partie blanche et un point blanc dans la partie noir ce n’est pas un hasard. Les éléments sont interconnectés.

Cela n’exclut pas certaines particularités des personnes HPI mais amène, à mon sens, une plus grande ouverture sur ce qu’est la « réalité » de chaque situation.

Ainsi l’identification forte à un groupe apporte t elle toutes les réponses ? Voir même apporte t elle les bonnes réponses ?

C’est une question qui m’a longtemps poursuivie.

Ma difficulté a parfois été grande par rapport à cela car je n’ai jamais vraiment réussi à adhérer totalement à une sorte d’identité proposée par un groupe en lien avec le haut potentiel.

J’en comprends d’autant plus l’apaisement qui peut apparaître lorsque l’on se sent accepté, reconnu par une communauté. On trouve d’autres personnes « comme nous ».

Mais est ce que chaque HPI est vraiment semblable à un autre ? C’est peu probable …

Par l’usage de termes génériques ou flous, l’action combinée de certains biais cognitifs incite parfois à partager les mêmes visions du monde, les mêmes questions, les mêmes problèmes. Mais si l’on creuse est ce vraiment les mêmes ? Parfois oui bien sûr ou tout du moins dans une certaine mesure. Mais parfois … Pas vraiment ! Il est simplement bon ici de s’y interroger et se méfier peut être des certitudes.

La méfiance n’étant pas à l’égard des autres mais bien à l’égard de ses propres convictions.

Si on souhaite aller plus loin et se connecter à son identité profonde l’identification à un groupe ne donne pas forcément toutes les clefs.

Cela peut être un appuie précieux bien entendu mais les clefs il conviendra d’aller les chercher en nous …

A ce stade je regrette tout de même qu’il y a parfois certaines dérives, en lien avec le vaste monde du haut potentiel, qui s’appuient sur des valeurs de groupe pour faire adhérer, rassurer et …enfermer.

Chose par exemple qui a été démontré : une erreur, lorsqu’elle est partagée, à tendance à ne plus devenir … une erreur ! ( voir Klucharev 2012 : « Nous modifions souvent nos décisions et nos jugements pour nous conformer au comportement normatif du groupe » )

Le tout est enrobé par des stratégies commerciales qui ne sont pas forcément empreintes de bienveillance. Là encore il est utile d’exercer son esprit critique.

Car qu’elle est le plus fort élément d’identification d’un groupe ? Bien souvent c’est celui de créer des marqueurs forts de séparation avec …les autres groupes.

Il y aurait donc, pour cibler le thème de mes réflexions : les surdoués, les HPI, les zèbres, les précoces, les philo cognitifs, les testés voir les non testés… Et …les autres.

Or plus on va appuyer sur les différences ( réelles ou fictives, perçues ou ressenties ) et plus on va avoir tendance à s’enfermer dans une définition de soi assez restrictive. Et si le « être » est restreint le « faire » pourrait le devenir tout autant.

En mettant trop de côté les interactions, les apprentissages dans les différences de chacun ( HP ou pas ! ) ainsi que tout ce qui nous ressemble et nous unis c’est des possibilités qui s’éteignent.

 

Être ensemble oui, être entre soi moins !

 

Il est impossible de vivre en dehors d’un groupe. Depuis que l’homme existe et lutte pour sa survie il s’associe et vit en groupe.

Par ailleurs le groupe peut être un lieu d’expression où l’on se sent à l’aise pour partager ses points de vues voir ses difficultés.

En soi cela peut être extrêmement bénéfique pour une personne HPI ou s’interrogeant sur ce sujet de se retrouver dans un groupe, une communauté, une association … dans laquelle elle se sent bien.

Mais le groupe doit être un tremplin et non un repli sur soi. Il devrait être un moteur de transformation personnel.

Il convient à mon sens d’être vigilant si par exemple le groupe reste ouvert et bienveillant aux autres personnes qui ne seraient pas « identifiées » comme pouvant faire partie de ce groupe.

Car rester dans une sorte de « entre soi » peut bloquer, à mon sens, la dynamique de compréhension de soi.

C’est par les échanges variés et différents que l’on peut véritablement se forger sa propre identité.

Il peut être par exemple intéressant de rester ouvert à différents groupes pour perpétuer ces échanges. Voir des groupes d’apparences contradictoires et opposés.

Je me souviens d’une personne qui me disait qu’elle ne comprenait bien que celles et ceux qui se disaient « zèbres ».

Cela pourrait prêter à sourire mais il y avait derrière une réelle difficulté à communiquer avec les « autres » y compris ceux qui pouvaient se dire HPI ou autres … Le tout semblait être ancré dans certaines croyances personnelles et pas forcément dans une réalité objective.

Un groupe qui « fait grandir » n’enferme pas…

Ainsi groupe et individu ne sont pas à opposer. Ils interagissent entre eux.

Si l’individu a ce besoin fondamental d’appartenance qu’il va retrouver dans le groupe ( ou les groupes bien sûr ) de son choix, le groupe en question ne doit son existence que grâce à la somme des individualités qui le compose.

Et le tout représente plus que la somme de chacun ( principe de non sommativité ! ). En bref les échanges se font en tout sens.

Le groupe d’ailleurs n’est pas forcément en cause par lui même. La plupart des groupes reposent sur des idéaux de partages ou de recherches d’explications ou d’informations.

C’est plutôt sa propre perception du groupe, ce que l’on en retire qui peut avoir certaines conséquences.

Si je m’identifie comme « surdoué » et que je me retrouve dans un groupe de « surdoués » je valide peut être certaines croyances, parfois en faisant certains raccourcis.

Je ne fais pas ici un jugement de valeur. Ce n’est pas un comportement négatif ou de faiblesse. C’est plutôt une tendance naturelle en lien avec notre fonctionnement cérébral ( et encore une fois ce n’est pas exclusif aux personnes HP … ). Et ça peut être tout à fait bénéfique !

Mais il me paraît essentiel de se questionner lorsqu’un groupe à tendance à devenir normatif c’est à dire édicter des codes et des lectures de la réalité assez rigides.

Le point positif c’est que cela rassure. Le point négatif c’est que cela peut restreindre son champ des possibles.

En conclusion il me semble bienvenue de s’interroger sur la façon dont l’identification à un groupe vient nourrir sa quête d’identité.

Si on y voit que du positif et que tout se passe au mieux alors c’est très bien ainsi ! Cela peut être effectivement un lieu d’échanges épanouissants.

Si par contre on n’arrive toujours pas à trouver ses propres réponses de manière vraiment satisfaisante, à savoir qui l’on est ou ce que l’on veut faire il est peut être temps d’essayer d’élargir sa vision.

Peut être remettre en question quelques croyances, prendre du recul sur ses comportements, son dialogue intérieur ou encore mettre à plat ses éventuelles difficultés en sortant du cadre « stricto sensu » HPI. En bref … Voir plus grand !

Se questionner également sur les éventuels biais cognitifs qui peuvent impacter sa vision des choses ( nous y sommes tous soumis d’une manière ou d’une autre ).

Ce qui me semble également important c’est qu’il n’y a pas de règles immuables. Le changement est toujours possible à partir du moment où l’on ressent ce besoin.

Éclaircir sa situation, poser des objectifs, se demander ce que l’on veut vraiment de différent dans sa vie et explorer les options pour y parvenir c’est aussi ce que l’on peut faire en coaching.

Enfin je rappel ici que je suis adepte du « non savoir », une philosophie qui se retrouve dans ma pratique de coach. Je ne suis ni psychologue ni chercheur ni scientifique. J’apporte simplement quelques idées sans prétention mais j’invite chacun/chacune à se faire son propre avis si le sujet l’intéresse.

Être dans le « non savoir » c’est laisser plus de place à l’autre. C’est donner plus de place à l’écoute et moins à l’interprétation. C’est laisser chacun être l’expert de sa propre vie.

Car au fond … Qui d’autre que vous peut savoir ce qui est le mieux pour vous même ?

Envie d’en savoir plus ? Des projets ou des questions ?

Nous pouvons en discuter.

 

Notes, sources et références :

Le signal d’apprentissage par renforcement prédit la conformité sociale :

Klucharev : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/19146819/

identité et comparaison sociale :

Hogg, MA (2000). Identité sociale et comparaison sociale. Dans J. Suls & L. Wheeler (Eds.), Manuel de comparaison sociale : Théorie et recherche (pp. 401-421)

« La comparaison sociale est une caractéristique omniprésente et fondamentale de la vie de groupe. Les gens se comparent aux autres membres du groupe, ils se comparent aux personnes d’autres groupes et ils comparent leur propre groupe avec d’autres groupes. De ces comparaisons émergent des normes de groupe, une structure de groupe et des relations intergroupes, qui à leur tour fournissent le cadre des comparaisons sociales basées sur le groupe. »

Réduction de l’incertitude subjective par l’auto-catégorisation : une théorie motivationnelle des processus d’identité sociale Hogg

https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/14792772043000040

« L’incertitude contextuelle peut être réduite par l’appartenance à un groupe et l’action de groupe. »